Lestat Addict
“Ce que le public te reproche, cultive-le, c’est toi !“
+Jean Cocteau+
A mon sens “Lestat le vampire” fait figure d’inoubliable perle au cœur de la jungle littéraire fantastique.
Comment, en effet, ne pas se laisser entraîner par la vie sulfureuse et tumultueuse de ce jeune immortel haut en couleurs… et en douleurs ?
On pourrait même se prendre à rêver à une hypothétique rencontre avec cette ombre tourmentée oscillant entre deux mondes, rien que pour panser les plaies de son cœur meurtri balançant entre le plan des mortels et celui des non morts prédateurs impénitents parfois bien malgré eux. Tous les vampiromanes épris de beauté, de voyages et de liberté ne peuvent que tomber sous le charme de ce Lestat anarchiste, assoiffé de renommée obsessionnelle, qui se lance à crocs éperdus dans l’exploration des sources vampiriques originelles. Un vampire galopin, libre penseur, attendrissant, farouchement opiniâtre, n’écoutant que ses propres lois, refusant ainsi de totalement mourir au monde et à ses êtres.
Oui, on devient véritablement addict au périple acharné de cette créature orpheline emplie de volonté indomptable, toujours habitée par cette étincelle d’humanité instinctive. Cette petite flamme vivace n’attend qu’un signal de notre part pour s’affranchir à jamais de toute aliénation imposée, luttant contre toute forme d’oppression. Comme si au fond, cette lueur nous soufflait “Soyez toujours vous-même, envers et contre tous ! Si vous vous sentez différents, montrez-le à la face de l’univers, hurlez-le sous les projecteurs, soyez-en fier car vous êtes beaux et forts d’être ce que vous êtes !”
Par conséquent, je pense que quelque part, tapi au creux de notre être, la “lueur d’un Lestat” sommeille. Oui, j’ai envie d’affirmer que ce cher Lestat représente l’arrogant porte-parole des causes marginalisées par la société. Il apparaît ici au paroxysme de sa gloire, traversant les siècles doté du panache d’un dieu intemporel et brillant !
Anne Rice s’impose ici comme une maîtresse es vampire incontournable en livrant cette œuvre magistralement conçue.
Il a été, pour ma part, jubilatoire de suivre l’épopée de son héros qui émerge nettement du lot d’une pourtant séduisante galerie de personnages évoluant autour de lui. Avec ce livre, on voyage. Et Anne Rice nous procure vraiment l’étrange sensation “d’avoir connu” son Lestat. Etait-il un fantasme jaillissant de sa part d’ombre goulûment attirée par ce séduisant vampire ? Qu’importe, car Lestat semble exister, lui et toute sa clique, nous emportant dans sa tornade épique ! Anne Rice nous fait don de son âme avec une crédibilité troublante, pleine de vents décadents. Après une telle démonstration, essayez de vous convaincre que les vampires ne sont que des créatures purement surnaturelles…
« Je serai un symbole, un hors-la-loi, un monstre, un être qu’on adore et qu’on méprise. Je ne peux pas y renoncer. Et franchement je n’ai absolument pas peur ! » Lestat à Louis (Lestat le vampire).